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« J’ai énormément appris sur ce tournage »

Vise le coeur - Interview de Claire Keim
Publié par Binoist Aurélie le 09/08/2022

Julia Scola, capitaine de police méritante, est totalement perturbée par l’arrivée de son nouveau commissaire, Novak Lisica. Car il s’agit en réalité de son ancien grand amour à qui elle n’a plus parlé depuis vingt ans. Le mystère qui lie ces deux personnages a particulièrement séduit Claire Keim, son interprète.

Fanny Robert et Sophie Lebarbier, les deux créatrices de « Profilage », sont à l’origine de ce projet. Cela a-t-il influencé votre décision ?
C’est Fanny Robert qui m’a convaincue d’accepter ce rôle ! Avant de lire les scénarios, je n’avais pas très envie d’entrer dans la peau d’un flic. Je craignais que m’immerger dans des enquêtes criminelles m’atteigne le moral. J’ai rencontré Fanny pour lui faire part de mes doutes. Elle m’a dit avoir écrit ce rôle en pensant à moi, ce qui m’a forcément touchée, mais surtout, nous nous sommes très bien entendues. J’avais l’impression de la connaître depuis longtemps : nos échanges étaient fluides et je lui ai posé plein de questions. J’ai beaucoup d’admiration pour les femmes qui écrivent et parviennent à s’imposer dans cet univers assez masculin, particulièrement pour Fanny Robert et Sophie Lebarbier qui ont réussi à apporter une touche particulière avec Profilage. Fanny foisonne d’idées, a les yeux qui pétillent et dégage beaucoup de vivacité. J’ai aimé sa personnalité et je crois avoir fait un petit transfert dans ma tête. Pendant le tournage, j’ai essayé de m’inspirer de son côté vibrant, piquant… Julia Scola est devenue un mélange entre ce que j’avais lu sur le personnage, ce que j’avais perçu de Fanny et moi.

Qu’est-ce qui vous a plu à la lecture du scénario ?
J’ai trouvé intelligent de raconter l’histoire des deux héros sur trois époques. L’enchevêtrement des séquences, construit à la manière d’un puzzle, permettait habilement de conserver le fil de la relation entre les deux héros, avec une question en toile de fond : que s’est-il passé entre ces deux personnages pour qu’il y ait une telle tension entre eux ? Cette interrogation m’a tenue en haleine tout au long des épisodes.

Comment décririez-vous votre personnage ?
Julia, fille d’un flic, a une admiration sans bornes pour son père. Elle a embrassé la même carrière que lui et ne veut pas le décevoir. Courageuse, entière, elle est très protocolaire dans ses enquêtes. La série commence après qu’elle a révélé un dossier #MeToo au sein de la DPJ, ce qui a provoqué du soutien mais aussi de l’hostilité autour d’elle. Elle est donc sous tension. C’est un personnage plutôt taiseux et si, en apparence, elle essaye de se montrer calme et solide, on sent une fébrilité en elle. J’aimais cette ambivalence qui la rendait assez mystérieuse. On sent qu’elle cache un secret et j’ai eu envie de le percer à jour.

Qu’avez-vous essayé de lui apporter ?
Je suis à un moment de bascule un peu effrayant mais aussi très intéressant dans ma carrière. J’évolue entre des héroïnes lumineuses et des femmes qui ont vécu des épreuves… et le portent sur elles ! Je voulais jouer à fond la carte du naturel, avec un personnage sans maquillage pour souligner son épuisement mental et physique, mais sur le tournage, l’équipe a un peu réfréné mes ardeurs ! Dans le jeu, je suis incapable de ne pas me servir de mes émotions pour interpréter un personnage. Les moments de connexion entre Julia et Novak sont rares dans la série et j’ai essayé de conserver de la fragilité entre eux. J’ai voulu défendre le droit de Julia à être émotive et sensible, au-delà de sa carapace de flic imperturbable.

Comment s’est passé le tournage ?
Le réalisateur, Vincent Jamain, a beaucoup de talent. Il se pose tout le temps mille questions, tente, teste… C’est à la fois vertigineux et très précieux car beaucoup de gens ont arrêté de douter alors qu’il est important de se questionner pour avancer. J’étais entourée d’une équipe super. Lannick Gautry est un comédien très instinctif. Vif et intelligent, il peut être très drôle sur un plateau. Je connaissais déjà les chroniques de Waly Dia dont j’étais très fan et j’étais ravie de le rencontrer. J’ai aussi fait une belle découverte avec Noémie Chicheportiche. Quant à Zinedine Soualem, je le connais depuis 30 ans et je l’aime énormément. Nous avions tourné ensemble dans mon premier court métrage quand j’avais 16 ans.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
J’ai énormément appris sur ce tournage, sur moi et ce que j’allais devoir régler pour travailler de façon plus sereine et m’abandonner encore plus. Sur un plateau, j’ai l’habitude de m’amuser je l’avoue. Or, si le personnage de Julia me fascine, il était aussi assez éprouvant. Je me suis retrouvée pendant trois mois plongée dans des histoires assez sombres. Il fallait malgré tout que je l’amène vers la lumière. Et on se demande constamment si Julia et Novak vont s’entretuer ou faire l’amour. Cette tension constante était géniale à jouer mais aussi épuisante.

Vous souvenez-vous d’un moment particulier ?
J’adorais les scènes sur les toits. La lumière était magique et j’avais la sensation d’être suspendue dans le ciel au-dessus des néons et des immeubles, très loin de Paris. Mais mon souvenir le plus marquant reste ma scène avec le loup. Il est l’autre raison pour laquelle j’ai accepté de faire cette série car ces animaux me passionnent. J’étais très heureuse d’avoir pu en approcher un. C’est un animal fascinant et d’une beauté absolue, j’étais subjuguée. Sur certains tournages, j’écoute en boucle la même musique pour m’imprégner d’un personnage. En l’occurrence, je me suis beaucoup servie de ce loup et de son regard perçant pour interpréter Julia !