Reportages découverte
Artisans, trouver un repreneur : un défi
Produit par : TF1 Production
Sur une idée originale de : la Direction de l'Information et Mathilde Pasinetti
Réalisé par : Laetitia Pongi
Présenté par Anne-Claire Coudray
Images : François Gagnant, Raphaël Licandro, Perrine Ruffin et Antoine Schmidt
Montage : Rodolphe Zagoury
C'est l'une des plus grandes richesses de la France, le terreau de nombreux savoir-faire : l'artisanat. Des métiers de passion qui rayonnent bien au-delà de nos frontières. Pourtant le secteur se retrouve face à une crise majeure : aujourd'hui, 75% des artisans ne trouvent pas repreneurs. Pour les "cédants", ceux qui veulent vendre leur boucherie, leur cordonnerie ou leur moulin, une course contre la montre s'engage afin que leur entreprise et leur savoir-faire ne disparaissent pas avec eux. Pendant près d'un an nous avons suivi des artisans qui se battent pour trouver des repreneurs.
En Dordogne, Jean-Jacques est le dernier boucher de la commune de Hautefort. Il a appris le métier de son père et y a consacré sa vie. En plus de sa boucherie, il sillonne les villages des alentours avec son camion pour servir les clients les plus isolés. A 65 ans, Jean-Jacques aimerait passer le relai. Ses enfants ayant choisi d'autres voies, il a mis sa boucherie et son camion en vente il y a quatre ans. " La boucherie, on ne va pas la vendre cher mais je veux qu'il y ait quelqu'un au moins ! ", insiste-t-il. Pourtant, dans quelques semaines, le boucher, fatigué, va arrêter les tournées. Et dans quelques mois, ce sera au tour de la boucherie. L'artisan ne s'avoue pas encore vaincu : il va tout mettre en œuvre pour trouver le candidat idéal pour lui succéder.
Près de Lille, Laurence est une des dernières canneuses artisanales de France. Depuis plus de vingt ans, elle réhabilite les techniques anciennes et se bat pour transmettre son savoir-faire. Il y a six ans, consciente que sa retraite arrivait à grands pas, elle a commencé à rechercher un repreneur pour son atelier et a formé plusieurs candidats. Mais à chaque fois, c'est un échec. Dans 15 jours, Laurence recevra Inès, une jeune femme intéressée pour un stage de cinq semaines. Si Inès fait ses preuves, Laurence lui apprendra toutes les subtilités et secrets de son métier et lui cèdera son atelier. Mais si la stagiaire n'est finalement pas la perle rare que recherche Laurence, l'artisane avoue qu'elle n'aura pas la force de continuer sa quête.
A Orbey, en Alsace, le moulin Marchand produit de la farine depuis près d'un siècle. Après son grand-père et son père, Claude est aux commandes avec son épouse Dominique depuis plus de quarante ans. A 67 ans, il a décidé de prendre enfin sa retraite, même si lâcher le moulin de son enfance est un crève-cœur. Claude cherche surtout un repreneur qui partagera sa philosophie d'un moulin familial et qui s'engagera à conserver son équipe de cinq salariés. Il a reçu des dizaines de dossiers et récemment l'un d'eux lui a tapé dans l'œil. Il s'agit de celui d'Ève, 59 ans, ancienne cadre supérieure dans l'industrie. Seul problème : Ève n'a aucune notion en meunerie et devra tout apprendre.
Enfin, à Carhaix en Bretagne, Jean-Jacques officie, lui, dans sa cordonnerie depuis 38 ans. En plus des chaussures, il répare les sacs, fabrique des doubles de clés et fait même un peu de serrurerie. Sa femme, Flavia, accueille les clients de la boutique atelier située en plein centre-ville. Seul cordonnier à 30 kilomètres à la ronde, Jean-Jacques ne manque pas de travail mais à plus de 60 ans, il a décidé de prendre sa retraite à la fin de l'année. Pour ses clients, c'est un choc, concède-t-il. Comme les repreneurs ne se bousculent pas à sa porte, le cordonnier a contacté la Chambre des Métiers et de l'Artisanat mais aussi un centre de formation des cordonniers. Est-ce que cela sera suffisant pour trouver un successeur ? Le compte à rebours est lancé : dans six mois, le cordonnier baissera le rideau définitivement si aucun candidat à la reprise ne se manifeste.