Article
Prochaine diffusion : 07/03/2025 à 21:10 sur TF1

«La pauvreté ne faiblit pas dans notre pays»

Publié par Vincent Vanessa le 11/02/2025

Patrice Douret, Président bénévole des Restos du Cœur, est formel : « Nous ne pouvons nous résigner à voir la pauvreté se reproduire, de génération en génération, comme une fatalité. Après avoir distribué pas moins de 163 millions de repas lors de la précédente campagne et accueilli 1,3 million de personnes, l’association constate que la vague ne fléchit pas. Pour autant, grâce à la mobilisation extraordinaire de ses 75 000 bénévoles, les Restos du Cœur refusent tout renoncement. Rencontre.

La 39e campagne des Restos du Cœur a donné lieu à une incroyable mobilisation. Envisagez-vous les mois qui viennent plus sereinement ?
Les Français ont été généreux, mais rien ne nous étonne car globalement, à chaque fois qu’une cause les rassemble, ils savent s’unir et répondre présent. Henri Nallet, ancien ministre de l’Agriculture, avait justement déclaré, de mémoire : « Les Restos du Cœur, c’est un peu la manifestation concrète d’un échec collectif. Mais c’est aussi quelque chose qui nous empêche de désespérer de la nature humaine ». Les années passent et le constat demeure inchangé. Nous avons dû lancer l’an dernier un cri d’alarme assez fort concernant à la fois Les Restos du Cœur, mais aussi et surtout les personnes en situation de précarité que nous accueillons. Aujourd’hui, nous sommes rassurés à très court terme car nous avons pu, grâce à la mobilisation de tous nos soutiens et à la générosité des Français, mettre en place une nouvelle aide des Restos du Cœur assez conséquente. Pour autant, rien n’est jamais acquis. Nous restons donc très attentifs à deux éléments : l’évolution des dons et celle de la précarité.

La situation reste donc critique, malgré tout…
Encore une fois, nous restons prudents. Nous avons été très raisonnables concernant les décisions prises, que ce soit il y a un an quand il a fallu s’astreindre à des mesures de restrictions ou cette année, à l’inverse, quand nous avons pris « des mesures d’espoir ». Grâce à ce soutien-là, nous allons effectivement pouvoir nous orienter vers les publics les plus vulnérables, les familles monoparentales et les jeunes enfants, mais avec une réserve car aujourd’hui, rien n’est stabilisé. Nous n’avons pas vu venir les trois crises successives et rapprochées que nous avons traversées : 2008, la crise sanitaire et la crise inflationniste. A chaque fois, ce sont les plus vulnérables et les plus démunis qui ont souffert. Nous restons extrêmement attentifs à toutes les évolutions de ces indicateurs car derrière tous ces chiffres, il y a surtout des visages. Il y a des femmes, des enfants et des hommes qui souffrent.

Qu’attendez-vous des pouvoirs publics dans les mois qui viennent ?
De l’écoute. Si l’an dernier, nous avons dû taper du poing sur la table, c’est parce que nous ne nous sentions pas assez écoutés. 200 000 personnes supplémentaires sont venues frapper à notre porte en quelques mois et 30 millions de repas supplémentaires ont été distribués. Que faut-il de plus pour être entendus ? Une historienne avec laquelle nous travaillons beaucoup affirme à juste titre que nous sommes « le sismographe de la pauvreté ». Quand un bénévole sur le terrain constate dans un centre itinérant ou urbain qu’il y a plus de personnes, de publics différents, plus d’enfants, c’est un mauvais signal. Nous avons ce retour tout de suite, pas deux ans après grâce à un institut de sondage - qui fait par ailleurs parfaitement son travail. Notre cri d’alarme du 3 septembre sur l’antenne de TF1 avait aussi et surtout pour but d’alerter ceux qui nous gouvernent. Comme le disait également Coluche, nos dirigeants ont la responsabilité de prendre des mesures structurelles permettant de faire baisser le nombre de personnes ayant recours aux associations de solidarité, comme Les Restos du Cœur. Elles doivent permettre de lutter contre la précarité, à la racine.

Remarquez-vous un changement de profil de celles et ceux qui poussent aujourd’hui vos portes ?
L’an dernier, nous avons dû refuser 110 000 personnes, que nous aurions normalement accueillies, en prenant des « mesures de sauvetage » nécessaires pour nous permettre de tenir dans le temps. Pour autant, nous avons quand même continué à en accueillir 1,3 million, soit le même chiffre que l’année précédente. Nous avons constaté deux choses : celles et ceux qui se sont présentées cette année sont dans des situations encore plus critiques qu’auparavant. Cette crise a donc continué à fragiliser les plus vulnérables. Par ailleurs, le nombre de jeunes enfants de moins de 3 ans accueillis ne cesse d’augmenter puisque nous sommes passés de 110 000 à 126 000, puis 128 000. Cette situation est dramatique. Si l’on ne fait rien, ce nombre atteindra peut-être les 130 ou 135 000, en 2025. Nous commençons d’ailleurs à voir de jeunes adultes qui étaient déjà, enfants, accueillis aux Restos du Cœur, et cela est très préoccupant. Enfin, les familles monoparentales sont particulièrement touchées par la précarité. Toutes les associations l’ont constaté : nous voyons de plus en plus de mamans essentiellement seules demander de l’aide alimentaire mais surtout, de l’accompagnement pour les aider à s’en sortir plus rapidement. Je n’oublie pas la jeunesse, durement frappée par la précarité, puisque près de la moitié des personnes que nous accueillons a moins de 25 ans. Tout est dit. Nous fabriquons donc un avenir façonné de personnes qui seront en difficulté et qui risquent de le rester, elles et leurs descendants. Il faut impérativement que nos gouvernants œuvrent pour les générations qui arrivent, sans oublier celles qui sont là, comme les retraités ou encore les agriculteurs.

Les Restos du Cœur demeurent indissociables des Enfoirés, qui retrouvent cette année Montpellier…
L’an dernier, les Enfoirés ont permis de récolter 11,6 millions d’euros pour l’association. C’est une ressource essentielle puisque 1 CD ou DVD acheté équivaut toujours à 17 repas offerts aux Restos du Cœur. Tout au long de l’année, sous la houlette d’Anne Marcassus, directrice artistique bénévole des Enfoirés, toute une armée du cœur travaille en coulisses pour proposer un spectacle moderne, intergénérationnel, qui continue à être vivement plébiscité par le public. Même si le marché du disque est en berne, le CD des Enfoirés figure parmi les meilleures ventes annuelles et l’audience télévisée du concert est toujours remarquable. Nous avons l’immense chance de réunir, chaque année, la plus belle affiche de France sur scène pour une semaine exceptionnelle de partage. Les nouveaux Enfoirés viennent épauler les « piliers », qui portent les valeurs des Enfoirés depuis 36 ans. C’est unique au monde.

Focus sur l’antenne de Montpellier

Cette année, les Enfoirés investissent la Sud de France Arena pour le spectacle «2025 Au pays des Enfoirés». Anita Barone, responsable départementale bénévole des Restos du Cœur de l’Hérault, dresse un état des lieux de la situation dans la région Occitanie.

«Dans le département, les Restos du Cœur accueillent 29 000 personnes. Nous avons sept sites à Montpellier. Depuis dix ans, notre siège est installé à Vendargues et tout part d’ici. La marchandise est livrée par camion dans nos 28 centres d’activités du département, de Béziers à Lunel en passant par Montpellier ou Bédarieux. Par ailleurs, un Camion du Cœur distribue 48 000 repas par an. L’an dernier, nous avons réparti 3,6 millions de repas dans le département. 25 % des personnes accueillies sont des familles monoparentales, des femmes seules avec des enfants, et nous accueillons au fil de l’année 1 200 bébés. C’est la grande cause de notre 40e campagne car cette situation est dramatique. Pour les 1 263 bénévoles réguliers des Restos du Cœur de l’Hérault et les quelque 300 occasionnels, le combat est quotidien et je redoute qu’il perdure encore longtemps, confie-t-elle. Nous avons également besoin urgemment d’un centre d’activité supplémentaire pour permettre de décharger l’un de nos centres de Montpellier qui accueille déjà 1 875 familles et qui explose. On a besoin de vous et on compte sur vous », conclut Anita Barone.

QUELQUES CHIFFRES CLÉS (2023 - 2024)

1,3 million de personnes accueillies, dont 128 000 bébés de 0 à 3 ans.

2 348 lieux d’accueil Restos du Cœur.

163 millions de repas distribués.

75 000 bénévoles réguliers + 30 000 bénévoles occasionnels.

65 centres itinérants.

101 ateliers et chantiers d’insertion.

2,3 millions de contacts auprès des gens de la rue.

2 591 personnes en difficulté, logées.

6 722 personnes accompagnées dans leurs recherches d’emploi.

6 196 départs en vacances.

30 360 personnes accompagnées à se saisir de leurs droits sociaux.

727 espaces petite enfance.

954 espaces livres.

POUR AIDER LES RESTAURANTS DU COEUR

Rendez-vous sur www.restosducoeur.org

ou adressez vos dons par courrier à l’adresse suivante :

Restaurants du Cœur - 42, rue de Clichy - 75 009 Paris

La solidarité, un engagement majeur de la politique RSE du groupe TF1

En tant que premier groupe média, le groupe TF1 s'engage à mettre la puissance de ses antennes et de ses réseaux sociaux au service de grandes causes, et à inviter le public à agir aux côtés des associations. Mise à disposition d'espaces publicitaires, reversement de gains issus des jeux et partage du savoir-faire audiovisuel, le Groupe accompagne près de 120 associations tout au long de l'année.

 

Liens et médias